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Risque de Fugue en Ehpad : définir, repérer, réagir, analyser et prévenir

Gregory Cousyn

April 29, 2025

Temps de lecture :

3 minutes

Une dame âgée, vêtue d'une chemise de nuit, marche dans un couloir d’Ehpad vers une porte vitrée avec un panneau "EXIT" au-dessus de la porte.
Médico-social / Social

La fugue d’un résident EHPAD est un événement redouté par les professionnels de santé. Elle constitue un risque majeur tant pour la sécurité du résident que pour la responsabilité de l’établissement.

Les conséquences peuvent être dramatiques : hypothermie, déshydratation, accidents de la voie publique, voire décès. 

Par ailleurs, l’impact émotionnel pour les familles et l’équipe soignante est souvent important, sans oublier les implications légales et administratives pour l’établissement. 

Cet article propose une approche méthodique pour prévenir ces situations et y répondre efficacement.

Définir la notion de fugue en Ehpad

Une fugue est définie comme le départ involontaire et non contrôlé d’un résident hors de l’enceinte de l’établissement, mettant potentiellement en danger sa sécurité.

Elle peut être motivée par plusieurs raisons :

  • Confusion cognitive : les résidents atteints de démence peuvent oublier où ils sont et chercher à rentrer chez eux.
  • Stress ou angoisse : un changement d’environnement ou une situation perçue comme stressante peut inciter le résident à partir.
  • Habitudes antérieures : certains résidents avaient l’habitude de sortir quotidiennement et peuvent essayer de reproduire ce comportement.

Fugue d’un résident : un événement indésirable grave

Une fugue est considérée comme un événement indésirable associé aux soins (EIAS) ou EIGS, selon sa gravité. 

Si la fugue entraîne des conséquences lourdes, telles que le décès du résident, une mise en danger du pronostic vital ou un déficit fonctionnel permanent, l’établissement doit obligatoirement déclarer l’événement sur le portail national des signalements.

Disparition d’un résident : risques et responsabilité pour l’établissement

En cas de fugue, la responsabilité de l’établissement peut être engagée pour défaut de surveillance.

  • Responsabilité administrative : l’établissement peut être sanctionné si les mesures de surveillance sont jugées insuffisantes.
  • Responsabilité pénale : si la fugue entraîne un préjudice grave, des poursuites peuvent être engagées contre l’établissement ou ses professionnels pour négligence.
  • Impact sur la réputation : un incident de fugue peut nuire à l’image de l’établissement et affecter la confiance des familles.

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Risque de fugue : un critère standard du référentiel d’évaluation HAS 

Dans le référentiel d’évaluation des ESSMS, le risque de fugue est repris au chapitre 2 via le critère standard : 

CRITÈRE 2.4.1 – Les professionnels adaptent le projet d’accompagnement aux risques de fugue ou de disparition auxquels la personne est confrontée.

Les attendus du critère

Ce critère fait l’objet d’un entretien avec l’évaluateur au cours duquel, il est regardé comment les professionnels :  

  • Analysent le risque de fugue ou de disparition de la personne accompagnée
  • Élaborent un projet d’accompagnement prenant en compte les risques identifiés
  • Mettent en œuvre tous les moyens nécessaires pour assurer la réalisation du projet d’accompagnement en tenant compte de ces risques.

En outre, il est demandé : 

  • Les éléments de traçabilité attestant de l’évaluation des risques de fugue ou de disparition dans le dossier de la personne, ainsi que des ajustements apportés au projet d’accompagnement si nécessaire.
  • Une procédure détaillée en cas de fugue ou de disparition, y compris pour les situations de disparition inquiétante, doit être disponible et accessible.

Comment repérer les profils à risque de fugue en Ehpad ?

L’identification des résidents présentant un risque de fugue est primordiale. 

Plusieurs facteurs doivent être pris en compte :

  • Antécédents de fugue : un résident ayant déjà fugué est plus susceptible de recommencer.
  • Troubles cognitifs : maladies neurodégénératives (Alzheimer, démence fronto-temporale) augmentent le risque.
  • État émotionnel : stress, anxiété, état dépressif.
  • Mobilité : les résidents capables de marcher facilement sont plus à risque.
  • Historique personnel : un résident ayant vécu seul et indépendant peut ressentir un besoin de liberté.

L’outil de prévention ESCAPE permet d’évaluer ces risques dès l’admission. Il se base sur trois catégories :

  1. Facteurs liés au patient (troubles cognitifs, comportements agités)
  2. Facteurs liés à l’environnement (accessibilité des sorties, surveillance insuffisante)
  3. Facteurs liés à l’entourage (soutien familial, compréhension du risque)

Et pour une évaluation plus poussée : 

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Disparition d’un résident en Ehpad : quelle est la conduite à tenir ?

Lorsqu’une fugue est suspectée, il est impératif d’agir rapidement en suivant une procédure claire et structurée :

  1. Vérification immédiate de la présence du résident : parcourir l’établissement et ses abords immédiats (jardin, couloirs, chambres voisines, zones communes).
  2. Si le résident est introuvable : alerter immédiatement l’équipe soignante et la direction.
  3. Recherche active : si plusieurs membres du personnel sont disponibles, une recherche rapide dans les alentours doit être effectuée (quartier, routes adjacentes, lieux de prédilection du résident).
  4. Alerter les forces de l’ordre (gendarmerie ou police) : fournir une description détaillée (âge, taille, corpulence, vêtements portés, signes distinctifs, éventuels troubles cognitifs ou de santé, dernier endroit où il a été vu, etc.).
  5. Prévenir la famille et les proches : les informer de la situation et recueillir des indices sur les lieux où le résident pourrait se rendre.
  6. Mobilisation de ressources complémentaires : en cas de recherche prolongée, impliquer les pompiers ou d’autres services spécialisés.

Conduite à tenir suite au retour du résident

Lorsque le résident réintègre l’établissement après une fugue, plusieurs actions doivent être menées :

  1. Évaluation médicale immédiate : vérifier son état de santé, rechercher d’éventuelles blessures, signes de déshydratation ou d’hypothermie.
  2. Informer les parties concernées : avertir la famille, la direction et, si nécessaire, les forces de l’ordre que le résident a été retrouvé.
  3. Accompagnement psychologique : proposer un entretien pour comprendre les raisons de la fugue et adapter l’accompagnement en conséquence.
  4. Mise à jour du dossier médical : consigner les circonstances de la fugue, l’état du résident à son retour et les mesures prises.
  5. Analyse de l’incident : compléter une fiche d’événement indésirable (FEI), organiser un retour d’expérience avec l’équipe pour améliorer la prévention.
  6. Renforcement des mesures préventives : ajuster la surveillance, sensibiliser le personnel et, si nécessaire, mettre en place des dispositifs de sécurisation supplémentaires.

Comment analyser les causes après l’incident ?

Après l’incident, l’analyse de risque a posteriori est vivement recommandée. L’utilisation de la grille ALARM permet une analyse approfondie des facteurs contributifs à la fugue :

  • Facteurs liés au résident 
  • Facteurs liés aux tâches à accomplir
  • Facteurs liés à l’individu (professionnels)
  • Facteurs liés à l’équipe
  • Facteurs liés à l’environnement de travail
  • Facteurs liés à l’organisation et au management
  • Facteurs liés au contexte institutionnel

Les barrières fonctionnelles et défaillantes doivent également être listées pour orienter les actions correctives.

Barrières fonctionnelles

Il s’agit de lister les barrières ayant fonctionné qui ont permis de minimiser les conséquences de la fugue. 

Voici des exemples : 

  • Alerte rapide du personnel grâce aux rondes de nuit.
  • Activation du protocole de recherche permettant une mobilisation efficace.
  • Intervention rapide des secours après détection de l’absence du résident.
  • Collaboration avec les forces de l’ordre, qui ont pu aider à retrouver rapidement le résident.

Barrières défaillantes

Il s’agit aussi de lister les barrières qui n’ont pas fonctionné, exemples  :

  • Porte de sortie mal sécurisée : absence de verrouillage ou système d’alarme inactif.
  • Surveillance insuffisante en période nocturne : manque de personnel pour détecter plus tôt la sortie du résident.
  • Absence de dispositif de localisation (ex. bracelet GPS), ce qui a retardé les recherches.
  • Formation insuffisante du personnel sur les signaux précurseurs de fugue.

L’objectif est d’identifier l’ensemble de ces failles et de mettre en place des actions d’améliorations adaptées.

Quelles mesures préventives mettre en place contre les fugues en établissement ?

Pour prévenir les risques, il est possible d’instaurer des barrières de sécurité adaptées :

  • Sécurisation des accès : installation de portes sécurisées avec code, alarmes aux sorties, surveillance vidéo.
  • Encadrement du résident : participation à des activités, promenades encadrées, accompagnement renforcé
  • Formation du personnel : reconnaissance des signes avant-coureurs (agitation, discours sur le départ).
  • Implication des familles : sensibilisation et communication sur les risques, participation aux décisions de sécurisation.
  • Dispositifs technologiques : bracelets GPS, détecteurs de mouvement, alarmes adaptées.

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À propos de l’auteur

Gregory Cousyn

Grégory occupe le poste de Head of Customer Care & Quality chez Qualineo. Son parcours : ancien infirmier diplômé d’état ayant travaillé pour le Ministère des Armées, Grégory Cousyn intègre un établissement de santé où il occupait un poste de direction. Son expérience s’articule autour de l’optimisation des organisations pour développer les performances et l’activité d’un établissement, l’appui à la stratégie et la gestion de projets.